Matthias Mölleney im Gespräch mit Lyreco

Contenu et résultat plutôt qu’engagement et temps

Le conseiller en RH Matthias Mölleney à propos d’une gestion utile des pauses et d’une philosophie intelligente des ressources.

 

Une règle pour pilotes dit : no coffee, no take-off. L’avez-vous connue chez Swissair et Lufthansa? Et pouvez-vous la confirmer?

Matthias Mölleney: Oui, ce n’est bien sûr qu’un dicton. La plupart des gens ont besoin de rituels. Pour eux, il est impensable de débuter la journée sans café. Si le rituel manque, quelque chose ne va pas. Mais pour une journée particulière, on peut modifier les rituels de manière ciblée afin de se mettre dans un autre état d’esprit. En principe, nous avons besoin de rituels pour que la vie fonctionne. Pour en revenir aux pilotes: ils ont une machine à café dans l’avion. La plupart ont même une Nespresso.

Vous dirigez le Center for Human Resources Management & Leadership à la Haute école d’économie de Zurich, la HWZ. Il est 12 heures, nous vous volons la pause déjeuner. Votre déjeuner est-il souvent sacrifié au bénéfice d’entretiens?

Un mandat d’enseignement implique le suivi des travaux de master et de bachelor. La pause de midi est le moment idéal pour les entretiens avec les étudiantes et étudiants. En raison de l’organisation virtuelle à la HWZ, la cafétéria est souvent aussi mon bureau. Pour plaisanter, je me vante parfois d’avoir le plus grand espace de travail de tous, et en plus avec restauration. Notre travail est la transmission de connaissances et non l’exploitation de bureaux. En outre, nous sommes en train de changer de nom. J’aimerais bien choisir Center for Human Relations Management. C’est plus précis, car nous sommes ciblés sur les relations. Mieux vous réussissez à mettre les gens en relation afin qu’ils travaillent ensemble à des solutions communes, mieux vous ­atteignez votre objectif. Si les gens travaillent les uns à côté des autres, ils ne gagnent rien. S’ils travaillent ensemble à une tâche, la moitié du chemin est déjà accomplie. Mais s’ils travaillent les uns pour les autres, cela devient vraiment intéressant. Ce sont alors de réelles «relations».

 

Une bonne gestion des pauses améliore la performance. Soutenez-vous cette thèse?

N’est-ce pas l’inverse? Si les gens se concentrent trop longtemps sur quelque chose, la performance diminue. D’après une étude pour les enseignants, la plage d’attention moyenne est de 18 minutes. Il est irréaliste de proposer une pause toutes les 18 minutes. Avec des formes d’enseignement différentes, on arrive toujours à stimuler l’attention. Je donne par exemple un cours magistral pendant 18 minutes, puis je laisse les étudiants travailler en groupes pendant 18 minutes.

 

Comment vos étudiantes et étudiants occupent-ils leurs pauses? Avez-vous une influence sur la culture de la pause?

Nous avons deux sessions chaque matin et chaque après-midi, interrompues par une pause de 20 mi­nutes. Certains étudiants préfèrent renoncer à une longue pause de midi au profit de pauses prolongées qu’ils passent dans un bar à côté, car le café y est meilleur. Si ça les aide, j’accède volontiers à ces besoins. J’ai affaire à des adultes. Je n’ai pas à leur dire comment ils doivent se comporter. Mais si je remarque qu’ils utilisent «mal» la pause pour des conference calls, il m’arrive de leur signaler en douceur qu’ils ne se rendent pas service.

HR-Berater Matthias Mölleney über ­sinnvolles Pausen­management und kluge Ressourcenphilosophie.

Matthias Mölleney, 56 ans, est propriétaire de l’entreprise PeopleXpert et responsable du Center for Human Resources Management & Leader­ship à la Haute école d’économie de Zurich (HWZ). Il conseille de nombreuses entreprises, des PME aux organisations internationales, en matière de stratégie de RH, de direction, de change management et de politique du personnel.

En tant que directeur du Future Work Forum, Londres, et auteur du livre «Die Zukunft möglich machen» (Rendre l’avenir possible), Matthias Mölleney traite de thèmes d’avenir et de changements. Il est également président de la Société zurichoise pour la gestion du personnel (ZGP), président de Perikom et président du Think Tank de Thurgovie.

Chez Swissair, vous avez vécu une période pleine de turbulences. En cas de paralysie du trafic, pense-t-on à sa propre pause?

Non. À partir d’un certain niveau d’urgence, notre propre pause n’a plus aucune importance. On profite d’occasions telles que des changements de lieu pour respirer. Par exemple dans la voiture. Heureusement, je suis résistant et je n’ai pas trop ressenti la pression élevée au travail. Mais je ne pouvais pas oublier les problèmes en arrivant à la maison simplement en fermant la porte de la voiture. J’ai aussi beaucoup de chance d’avoir un bon sommeil. Si on ne récupère pas non plus la nuit, ça devient critique.

 

Vous conseillez les entreprises en matière de gestion du personnel. Que conseillez-vous aux dirigeants en matière de philosophie des pauses?

Ceux qui demandent constamment des pauses chez nous passent vite pour des gens peu résistants. Il existe aussi des gens qui se surmènent constamment, mais apportent une excellente performance. Il est difficile de les freiner et de renoncer à leur performance. Si l’on constate qu’une personne dont on a besoin le lendemain se dirige tout droit vers une crise, c’est notre devoir de lui accorder une pause. Il faut de la clairvoyance et de l’expérience pour évaluer à long terme comment utiliser les ressources de manière optimale. En tant que conseiller, je me vois comme un instructeur de vol. J’accompagne dans le cockpit, mais c’est le cadre qui doit piloter.

 

Vous traitez aussi le thème des changements et développements futurs dans le monde du travail. La pause sera-t-elle bientôt un modèle en voie de disparition?

Je pense qu’à l’avenir, de nombreux employés devront être plus autonomes. De mon point de vue, la gestion du temps devrait relever nettement plus de la responsabilité individuelle. Un conducteur de tram assis pendant huit heures aux commandes en fait deux fois plus que quelqu’un qui ne conduit que quatre heures. Cependant, si un journaliste passe huit heures à écrire un article, le texte n’est pas simplement deux fois meilleur que celui que son collègue a bouclé en quatre heures. On commence lentement à prendre conscience de cela. La performance des collaborateurs est de moins en moins mesurée selon le modèle temporel. C’est contraire au principe d’enregistrement du temps, mais les deux paramètres du travail et du temps ne sont aucunement liés. Si le travail est mesuré selon le contenu et le résultat et non plus selon l’engagement et le temps, cela donne lieu à de nouvelles formes d’autonomie. Il en va de même pour les pauses. Nous devons négocier ce qui doit être fourni. Le temps nécessaire est accessoire. C’est pourquoi nous devons apprendre aux gens comment gérer au mieux leurs ressources et arrêter d’être paternalistes avec les collaborateurs en matière de répartition du temps de travail. Ils peuvent ainsi également évaluer les conséquences de leurs actions.